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– Octobre 2024 –
Focus sur le projet de loi finances pour 2025 et les derniers amendements
Le 10 octobre dernier, le projet de loi de finances pour 2025 a été présenté en Conseil des ministres. Ce projet est discuté à l’Assemblée nationale depuis lundi 21 octobre jusqu’au 19 novembre 2024 avant son examen par le Sénat. Rappelons que la date limite pour la publication de la loi de finances au Journal officiel est fixée au 31 décembre 2024.
L’examen de cette loi est ponctué par le dépôt d’un très grand nombre d’amendements qui pourraient grandement modifier ou compléter les mesures portées par le projet initial. L’ombre de l’article 49.3 plane lourdement sur les vifs débats autour de ce texte.
Vous trouverez ci-après nos observations à date sur ce projet.
1. Fiscalité des entreprises :
Contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises
L’article 11 du projet de loi de finances prévoyait l’instauration d’une contribution exceptionnelle additionnelle à l’impôt sur les sociétés due par les entreprises réalisant en France un chiffre d’affaires égal ou supérieur à un milliard d’euros.
La contribution exceptionnelle devrait être temporaire (deux exercices consécutifs clos à compter du 31 décembre 2024) et assise sur l’impôt sur les sociétés calculé sur l’ensemble des résultats imposables avant imputation des réductions et crédits d’impôt ainsi que des créances fiscales de toute nature.
Cet article a été supprimé au cours des débats : Non-adoption à l’issue d’un scrutin public dans sa version amendée par le NFP (Amendement I-2277 qui proposait de relever les taux de ces contributions exceptionnelles, de manière à appliquer un taux temporaire d’impôt sur les sociétés de 40% pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à un 1 Md€, et de 55% pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 3 Md€).
Nouvelle taxe pour les réductions de capital consécutives au rachat d’actions propres
Cette taxe serait applicable aux entreprises réalisant un CA individuel ou un CA consolidé de plus de 1 Md€ en France qui procéderait à une réduction de capital par annulation d’actions rachetées par l’entreprise.
L’assiette de cette taxe serait constituée par le montant de la réduction de capital et d’une fraction des sommes qui revêtent sur le plan comptable le caractère de primes liées au capital.
Le taux de cette taxe serait de 8%. Celle-ci serait déclarée et liquidée avec la déclaration de chiffre d’affaires (TVA).
Autres mesures du Projet de loi de finances pour 2025 concernant les entreprises
- Imposition minimale mondiale des groupes d’entreprises multinationales et groupes nationaux (première mise à jour). Le taux minimum de 15% a notamment été relevé à 23% pour 2025 et 25% dès 2026 par amendement.
- Report de la baisse du taux de la CVAE : Le dispositif prévoit une réintroduction échelonnée sur quatre ans, avec un seuil d’application qui diminue progressivement : 1 Md€ de chiffre d’affaires en 2024-2025, puis 100 M€ en 2026, 10 M€ en 2027, et enfin 1 M€ en 2028. Cette approche graduelle vise à cibler initialement les très grandes entreprises avant d’élargir progressivement l’assiette aux entreprises de taille intermédiaire.
- Aménagement du régime des fusions (adaptation au regard de l’ordonnance n° 2023-393 du 24/05/2023 notamment relative aux opérations de « scission partielle »)
2. Fiscalité des particuliers
Barème de l’impôt sur le revenu
Les tranches du barème de l’Impôt sur le Revenu (IR), les seuils et limites qui lui sont associés et les grilles de taux par défaut du Prélèvement à la source seraient indexés sur la prévision de l’inflation, soit 2% en 2024.
Les limites des tranches de revenus des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source (PAS) seraient également ajustées, en fonction de l’évolution du barème de l’impôt sur le revenu, pour les revenus perçus ou réalisés à compter du 1ᵉʳ janvier 2025.
Contribution différentielle sur les hauts revenus
L’article 3 du projet prévoit l’institution d’une contribution différentielle sur les hauts revenus, visant à assurer une imposition minimale de 20 % pour les contribuables disposant des revenus les plus élevés.
Les contribuables concernés seraient les contribuables fiscalement domiciliés en France, dont le revenu excède 250 000€ pour les contribuables célibataires et 500 000 € pour un couple.
La contribution serait calculée comme la différence entre 20% du revenu fiscal de référence et la somme de l’IR, de la CEHR et de certains prélèvements libératoires, tout en prenant en compte divers avantages fiscaux (réductions d’impôt, crédits d’impôt).
Il devait s’agir d’une mesure temporaire qui s’appliquerait sur les revenus des années 2024 à 2026, toutefois plusieurs amendements ont proposé qu’elle soit instaurée de manière pérenne.
Modalités d’imposition des non-résidents de France
Les personnes qui satisfont à l’un des critères de résidence fiscale en France ne seront pas considérées comme ayant leur domicile fiscal en France si, en application des conventions fiscales internationales, elles ne sont pas regardées comme résidentes de France.
Cette disposition permettrait de légaliser la primauté du droit conventionnel en la matière.
Fin de l’avantage fiscal de la location meublée non professionnelle (LMNP)
Les contribuables relevant du régime de la LMNP peuvent jusqu’à présent, sous certaines conditions, déduire de leurs recettes locatives imposables les amortissements afférents au logement loué sans que ceux-ci soient pris en compte dans le calcul de la plus-value lors de la cession dudit logement.
Le Projet de loi de finances prévoit que, pour les cessions intervenant à partir du 1ᵉʳ janvier 2025, les amortissements déduits pendant la période de location d’un bien soient effectivement pris en compte pour le calcul de la plus-value immobilière de cession.
Autres mesures du Projet de loi de finances pour 2025 concernant les particuliers
- Interdiction de l’utilisation du PEA pour les titres issus d’un exercice de BSPCE. La loi prévoit également de distinguer le gain de cession, de nature patrimoniale, qui bénéficierait des dispositifs de sursis et de report d’imposition, du gain d’exercice, de nature salariale, qui serait immédiatement imposable au moment de l’apport et soumis à la flat tax.
- Prorogation de l’abattement applicable aux plus-values réalisées par les dirigeants de PME jusqu’en 2031
- L’institution par voie d’amendement d’un impôt annuel sur les très hauts patrimoines (supérieur à 1 000 000 000 €) désigné sous le nom d’impôt Zucman.
3. Focus mesures TVA
Application du taux normal de TVA pour la fourniture et la pose de chaudières utilisant des combustibles fossiles
La loi prévoit d’exclure la fourniture et l’installation de chaudières recourant à des énergies fossiles du bénéfice du taux réduit de TVA de 5,5 % et du taux intermédiaire de 10 % applicables aux travaux portant sur des locaux à usage d’habitation achevés depuis plus de deux ans.
Cette loi entrerait en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2025, conformément au II de l’article 10 du projet de loi, et devrait donc s’appliquer aux prestations dont le fait générateur interviendra à compter de cette date.
Ce texte a toutefois été aménagé par amendement :
- Amendement I-3281 qui propose une exception significative en maintenant le bénéfice du taux réduit (5,5% ou 10%) pour les chaudières hybrides où l’énergie fossile n’intervient qu’en appoint.
- Amendement I-3481 qui entend garantir dans la loi le maintien de l’éligibilité des énergies de récupération dans le champ d’application du taux réduit de TVA pour la chaleur distribuée dans des réseaux vertueux.
Tarifs d’accise sur l’électricité et le gaz
L’article 7, II du projet de loi prévoyait notamment de supprimer le bénéfice du taux réduit de TVA de 5,5 % prévu par l’article 278-0 bis, B du CGI pour les abonnements relatifs aux livraisons d’électricité et de gaz naturel, tout en neutralisant les incidences de cette suppression par une modification des tarifs des accises portant sur ces produits, également mises en œuvre par le présent article. L’impact devrait donc être neutre pour le consommateur final.
Cet article a été supprimé par amendement.
Institution d’une TVA à 5,5% sur la construction et rénovation de logements sociaux (Amendements I-487, I-2046, I-2265, I-2555)
4.Focus impôts locaux
Afin de faire échec à la récente jurisprudence « Société immobilière Carrefour et Société Leroy Merlin » du Conseil d’État, l’article 16 du projet de loi prévoit de figer au 1ᵉʳ janvier 2017 le montant du « planchonnement » des valeurs locatives des locaux professionnels pour toutes les impositions non contestées avant le 10 octobre 2024.
On rappelle que, pour atténuer les effets de la révision des valeurs locatives cadastrales des locaux professionnels, dont les résultats s’appliquent pour l’établissement des impositions dues à compter de 2017, le « planchonnement » limite la variation de la valeur locative, appréciée après application d’un coefficient de neutralisation. Pour les impositions dues au titre de 2017 à 2025, selon que la différence entre la valeur locative non révisée au 1ᵉʳ janvier 2017 et la valeur locative révisée est positive ou négative, ce mécanisme majore ou minore la valeur locative révisée d’un montant égal à la moitié de cette différence.
Alors que l’administration fiscale ne prenait en compte, pour le calcul du « planchonnement », que la valeur locative révisée attribuée au titre de l’année 2017, par comparaison avec la valeur locative non révisée au 1ᵉʳ janvier 2017, le Conseil d’État a jugé qu’il convenait au contraire de la prendre en compte au titre de chacune des années concernées par le « planchonnement », sans exclure la possibilité d’appliquer au tarif par mètre carré retenu un coefficient de localisation fixé postérieurement à 2017 (CE QPC 13-11-2023 n° 474735, 474736 et 474757). Il résulte de cette décision que l’administration aurait dû recalculer le « planchonnement » et les impositions induites, de manière générale, chaque année pour tous les locaux concernés, cette jurisprudence ouvrant ainsi la porte à des opportunités de recours pour les contribuables en matière de taxe foncière et de CFE.
L’article 1518 A quinquies, III du CGI, tel que modifié par le présent article, préciserait donc expressément que, pour calculer la différence entre la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 et la valeur locative révisée, celle-ci serait retenue au 1er janvier 2017.
La pratique de l’administration fiscale, qui consiste à cristalliser la situation au 1ᵉʳ janvier 2017, serait donc légalisée. La fixité du «planchonnement » s’appliquerait de façon rétroactive aux impositions dues à compter de 2023, sous réserve des impositions contestées avant la présentation du projet de loi de finances en Conseil des ministres. Ainsi, sauf réclamation introduite avant le 10 octobre 2024, les impositions établies au titre de 2023 et 2024 en retenant un « planchonnement » figé seraient validées.
4. Focus sur les amendements à retenir
Augmentation du prélèvement forfaitaire unique
La commission des finances a validé une augmentation générale du taux du prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30% à 33%.
Concrètement, la partie correspondant à l’impôt sur le revenu dans le PFU passe de 12,8% à 15,8%, les prélèvements sociaux restant inchangés à 17,2%.
Cette hausse s’appliquera à un large éventail de revenus du capital, incluant les dividendes, les plus-values mobilières, les intérêts et autres revenus assimilés. La mesure modifie plusieurs articles du Code général des impôts, assurant une application cohérente à travers différents types de revenus, du patrimoine et de placements.
Création d’une nouvelle taxe de solidarité sur les dividendes.
Sur le plan technique, cette taxe fixée à 10% s’appliquerait aux entreprises immatriculées en France, redevables de l’IS, réalisant plus de 2 Md€ de chiffre d’affaires et cotées sur un marché réglementé
Amendement n°I-2013
Modification du régime mère fille.
Cet amendement restreint le bénéfice du régime mère-fille aux seules filiales situées dans l’UE ou l’EEE ayant conclu une convention d’assistance administrative avec la France. D’autre part, il plafonne la déduction fiscale pour les filiales hors UE en introduisant une limite basée sur un taux d’IS majoré de 50% par rapport au taux français.
Un autre amendement vise à exclure les holdings du bénéfice du régime fiscal des sociétés mères-filles, afin de soumettre leurs bénéfices à l’impôt sur les sociétés de droit commun.
Ajout d’une condition à l’exonération de plus-value au titre de la résidence principal
L’amendement vise à réintroduire un délai minimal de détention de cinq ans pour qu’une résidence principale puisse bénéficier de l’exonération de plus-values immobilières.
L’amendement prévoit toutefois des exceptions importantes pour ne pas pénaliser les situations légitimes. Ainsi l’exonération demeure sans condition de durée dans trois cas : Pour l’achat d’une nouvelle résidence principale, Pour des motifs familiaux impérieux (décès, séparation), Pour des raisons médicales (hospitalisation longue durée, entrée en EHPAD) ou professionnelles (mutation).
Alignement de la fiscalité de la transmission des contrats d’assurance-vie après abattement sur les droits de succession en ligne directe
Dans l’état actuel du droit, l’assurance-vie bénéficie d’un traitement fiscal à la succession très avantageux. Pour les versements effectués avant 70 ans, ceux-ci sont exonérés de droits de succession s’ils ne dépassent pas 152 500 euros. Au-dessus de cette limite, un prélèvement de 20% s’applique pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire inférieure ou égale à 700 000 €, et à 31,25 % pour la fraction de la part taxable de chaque bénéficiaire excédant cette limite.
Ce barème après abattement dont bénéficient les produits d’assurance-vie est donc plus avantageux que celui appliqué aux successions en ligne directe. C’est dans ce cadre qu’un amendement a proposé d’aligner la fiscalité de la transmission des contrats d’assurance-vie après abattement sur le modèle des droits de succession en ligne directe.
Amendement n°I-CF1807
Création d’une nouvelle catégorie d’entreprises innovantes : les « Jeunes Entreprises d’Innovation à Impact » (JEII), qui vient compléter le dispositif existant des Jeunes Entreprises Innovantes (JEI)
Cette nouvelle catégorie cible spécifiquement les entreprises qui conjuguent innovation et impact social. Pour être éligible, une entreprise doit consacrer au moins 5% de ses charges fiscalement déductibles à la recherche et répondre aux critères des entreprises d’utilité sociale ou aux conditions de l’économie sociale et solidaire définies par la loi de 2014.
L’amendement prévoit un avantage fiscal significatif pour encourager l’investissement dans ces JEII : une réduction d’impôt sur le revenu portée à 40% pour les souscriptions au capital de ces entreprises, contre les taux habituels plus bas. Ce dispositif serait applicable jusqu’au 31 décembre 2027.
Simplification du développement de l’actionnariat salarié dans les PME et ETI en assouplissant les conditions fiscales liées aux attributions gratuites d’actions
La mesure proposée étend le mécanisme de sursis d’imposition, qui existe actuellement uniquement pour les attributions d’actions gratuites à l’ensemble des salariés, aux cas où l’attribution concerne au moins 25% des salariés, conformément aux nouvelles dispositions introduites par la loi ANI
- Obligation pour les sociétés ayant bénéficié du CIR à rembourser le montant octroyé lors des trois précédents exercices fiscaux en cas de délocalisation, perdant également le droit de demander ce crédit d’impôt pour les trois prochains exercices
Amendement n°I-936
- Rehaussement de l’abattement à 120 000 € pour les donations et successions en ligne directe
- Institution d’une TVA à 5,5% sur l’électricité/gaz pour les consommations essentielles ;
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