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Crédit d’impôt recherche

Dépenses de sous-traitance

En application de l’article 244 quater B, II-d du Code général des impôts (ci-après « CGI »), les dépenses exposées pour la réalisation d’opérations de recherche, confiées à des organismes de recherche publics (ou assimilés) ou à des organismes de recherche privés agréés par le Ministre chargé de la recherche ou à des experts scientifiques ou techniques agréés dans les mêmes conditions, sont retenues pour déterminer la base du crédit d’impôt recherche (ci-après « CIR »).

Les opérations liées à un projet CIR peuvent être éligibles par nature ou par extension car effectuées dans le cadre d’une démarche de R&D. Ainsi, les travaux éligibles par nature sont ceux qui couvrent les domaines de la recherche fondamentale, de la recherche appliquée et du développement expérimental. Toutefois, selon la doctrine administrative, une opération non éligible par nature le devient lorsqu’elle est indispensable à la réalisation d’un projet lui-même éligible (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 § 310).

Cette règle, de portée générale, devrait s’appliquer aux dépenses de sous-traitance. Ainsi, une opération sous-traitée non éligible au CIR prise isolément devrait toutefois être qualifiée d’éligible si elle est indispensable à la réalisation du projet, lui-même considéré comme éligible au CIR. Néanmoins, la position de l’administration fiscale (1) et de la jurisprudence administrative (2) ne sont pas en adéquation sur ce point.

1. Position de l’administration fiscale

L’administration fiscale s’oppose à cette logique et rejette les dépenses de sous-traitance dès lors que les opérations confiées ne sont pas éligibles par nature au CIR. Afin d’appuyer sa position, l’administration fiscale se réfère à sa doctrine administrative qui précise que « les dépenses engagées doivent correspondre à la réalisation de véritables opérations de recherche et de développement, nettement individualisées » (BOI-BIC-RICI-10-10-20-30 § 1). Cette doctrine est afférente aux dépenses de sous-traitance, elle n’a donc pas de valeur de portée générale.

Cette tendance ressort également du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, qui, dans ses Guides CIR 2018 et 2019 précise que « les travaux sous-traités doivent correspondre à la réalisation de véritables opérations de R&D, nettement individualisées (une prestation sous-traitée qui n’est pas de la R&D n’est pas éligible au CIR même si elle est indispensable à la réalisation du projet)« . Cette précision appuie ainsi la position adoptée en pratique par l’administration fiscale. Toutefois, bien que cette position du Guide soit précise et exempte d’interprétation, elle est également dépourvue de toute valeur juridique. En effet, le guide CIR n’est publié qu’à titre indicatif et ne possède aucune force juridique ni aucun pouvoir contraignant.

2. Position de la jurisprudence

Sur la question des opérations de sous-traitance, la jurisprudence a fait preuve d’une disparité avant de prendre une position ferme par une décision du Conseil d’État. Ainsi, un premier arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux de 2015 avait considéré qu’avant de rejeter des dépenses de sous-traitance, il faut (i) étudier si les opérations sous-traitées sont constitutives de R&D ou, à défaut, (ii) étudier si ces opérations, bien que non constitutives de R&D en soit, sont indispensables à l’aboutissement d’un projet lui-même éligible au CIR (CAA Bordeaux, 17 juillet 2015 n°14BX00454).

Toutefois, la Cour administrative d’appel de Paris s’est prononcée en fin d’année 2018 sur cette même problématique et a pris une position inverse (CAA Paris 20 décembre 2018, n°18PA00256). En l’espèce, il s’agissait de dépenses de sous-traitance non éligibles en soit mais indispensables à la poursuite de projets CIR qualifiés d’éligibles par l’administration fiscale. Or, la CAA de Paris rejette les dépenses de sous-traitance aux motifs :

  • Que le contenu des opérations ne peut être regardé comme présentant les caractéristiques d’une opération de recherche au sens des dispositions de l’article 244 quater B du CGI ;
  • Que la doctrine administrative ne comporte pas d’interprétation de la loi fiscale qui soit différente de celle dont il est fait application dans l’arrêt en question.

Cette décision avait fait l’objet d’un pourvoi en cassation. C’est ainsi que par un arrêt du 22 juillet 2020, le Conseil d’État casse la décision rendue par la CAA de Paris (Conseil d’État, 22 juillet 2020 n°428127).

Selon le Conseil d’État, dans son attendu de principe, « lorsqu’une entreprise confie à un organisme mentionné au d ou au d bis du II de l’article 244 quater B du code général des impôts l’exécution de prestations nécessaires à la réalisation d’opérations de recherche qu’elle mène, les dépenses correspondantes peuvent être prises en compte pour la détermination du montant de son crédit d’impôt quand bien même les prestations sous-traitées, prises isolément, ne constitueraient pas des opérations de recherche« .

Afin d’arriver à cette conclusion, le Conseil d’État rappelle que l’éligibilité au CIR des projets poursuivis n’était pas contestée et « qu’il n’est pas contesté que les prestations en cause, qui s’inscrivaient dans le cadre scientifique des projets de recherche entrepris, étaient nécessaires à la réalisation des opérations de recherche« . Ainsi, nonobstant le fait qu’une prestation sous-traitée ne soit pas une opération de R&D en soit, cette opération est éligible au CIR du donneur d’ordre dès lors qu’elle est indispensable à la poursuite de projets eux-mêmes éligibles au CIR.

Cette décision vient ainsi clarifier une situation dans laquelle le contribuable subissait une incertitude.

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