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Perte et gain statut PME communautaire

La notion de PME communautaire permet à des entreprises de bénéficier de certains dispositifs de faveur tant au plan national que communautaire. C’est ainsi que, pour exemple, une PME au sens communautaire pourra obtenir un remboursement immédiat de son crédit d’impôt recherche non imputé sur l’impôt dû ou pourra déclarer des dépenses éligibles au titre du crédit d’impôt innovation.

Cette notion est issue de l’annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité. Pour l’application de différents régimes de faveur, la législation ou la doctrine fiscale française renvoient explicitement et systématiquement au règlement communautaire, sans pour autant retranscrire dans le corps de la doctrine administrative l’intégralité du règlement.

 

Afin d’être qualifiée de PME communautaire, une entreprise doit, à la clôture de chaque période d’imposition, réunir simultanément deux conditions : l’effectif salarié doit être inférieur à 250 personnes et le chiffres d’affaires annuel ne doit pas excéder 50 millions d’euros ou le total du bilan annuel ne doit pas excéder 43 millions d’euros.

 

Selon l’article 4 de l’annexe 1 du règlement européen, l’acquisition du statut de PME n’est effective que si les conditions sont respectées au titre de deux années consécutives. Il en est de même s’agissant de la perte du statut. Les causes ayant entrainées le dépassement des seuils sont sans incidence à la lecture du règlement. Néanmoins, ces précisions n’apparaissent à l’identique ni dans la loi française, ni dans la doctrine administrative. En effet, la législation française renvoi directement à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l’annexe I au règlement n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014. La doctrine administrative, quant à elle, accentuait principalement ses développements sur la perte du statut. Ces ainsi que certaines sociétés avaient alors considéré que le bénéfice du statut se fait dès la première année. Or, cette position fait encourir une insécurité juridique.

 

En 2016, un tribunal administratif avait pu estimer que l’acquisition du statut, même dans le silence de la loi ou de la doctrine, devait suivre le même principe que la perte du statut, comme le prévoit le règlement européen. C’est ainsi que le tribunal avait, en matière de CICE, estimé que le statut de PME communautaire ne pouvait être acquis que si l’entreprise en question respectait les conditions requises pendant deux années consécutives (TA Montreuil, 17 novembre 2016 n°1509697).

 

En prenant appui sur un rescrit afférent au CIR et publié le 6 mars 2021 (BOI-RES-000034), l’administration fiscale a modifié sa doctrine et a précisé les modalités de perte et d’acquisition du statut de PME communautaire et ce, pour tous les crédits d’impôt dont le remboursement immédiat des créances correspondantes est ouvert aux PME au sens du droit de l’Union européenne. Ainsi, selon cette doctrine, si une entreprise dépasse les seuils suite à une fusion ou à son rachat par un plus grand groupe, la perte du statut est alors immédiate. Cette perte est alors effective à compter de la date de réalisation de l’opération ayant entraînée le changement d’actionnariat. Cette position peut ainsi s’avérer très pénalisante et restrictive pour toute opération s’effectuant en fin d’année civile ou en fin d’exercice.

 

Ce rescrit vise explicitement le cas où l’entreprise cible subit un changement d’actionnariat. En parallèle, une entreprise recouvre immédiatement la qualité de PME communautaire dès sa sortie d’un groupe économique si elle respecte les seuils applicables à la date de clôture du premier exercice clos en tant que société indépendante. Afin d’appuyer son raisonnement, l’administration fiscale s’appuie sur la décision n°2012/838/UE Euratom de la Commission du 18 décembre 2012. Cette décision est afférente à la Communauté européenne de l’énergie atomique pour des activités de recherche et de formation dans le domaine nucléaire.

 

En adoptant cette position, la doctrine administrative va ainsi au-delà du texte européen instituant la PME communautaire en créant plusieurs situations distinctes non initialement prévues. De plus, elle se base sur des dispositions très précises qui n’ont pas vocation à endosser une portée générale. Cette position était d’ailleurs reprise au sein du Guide de la PME communautaire.

 

Toutefois, le 3 décembre 2020, la Cour administrative d’appel de Nancy, n°19NC02371-19NC02372-19NC02373, a estimé que la décision Euratom, invoquée par l’administration fiscale, ne s’impose qu’à ses destinataires. En effet, cette décision « n’a pas été reprise par la Commission européenne dans le cadre de l’annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 et se trouve ainsi dépourvue de valeur règlementaire« . La Cour rappelle également que le guide de la PME communautaire, qui reprend les termes de la décision Euratom, édité par la Commission en 2015, est dépourvu de caractère règlementaire. En conséquence, selon la Cour, il convient de se référer à l’article 4 de l’annexe 1 au règlement n°651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 qui précise que « le dépassement des seuils d’effectif et financier n’a pour effet de faire perdre ou acquérir la qualité de PME que si ce dépassement se produit pour deux exercices consécutifs« .

 

La doctrine administrative de mars 2019 a engendré ainsi une multitude de recours relatifs à sa contradiction avec le règlement européen instituant la qualification de PME communautaire. Devant cette problématique, l’administration fiscale a finalement décidé de revenir sur le contenu de sa propre doctrine.

 

Ainsi, en date du 13 juillet 2021, la doctrine administrative a été modifiée. Toute référence au rescrit du 6 mars 2021 (BOI-RES-000034) est supprimée. La doctrine, opposable à l’administration fiscale en application de l’article L80A du Livre des procédures fiscales, précise dorénavant que « lorsqu’une entreprise, à la date de clôture du bilan, dépasse le seuil de l’effectif ou les seuils financiers énoncés aux II-A-1-a et b § 80 à 130, cette circonstance ne lui fait perdre la qualité de PME que si elle se produit au titre de deux exercices consécutifs. De manière symétrique, lorsqu’à la clôture du bilan une entreprise qui n’avait pas jusqu’à présent la qualité de PME, constate qu’elle respecte les critères de seuils, elle n’acquiert la qualité de PME que si le respect de ces seuils se produit au titre de deux exercices consécutifs (règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014, ann. I, art. 4, 2). Cette appréciation des seuils sur une période de deux exercices consécutifs s’applique également dans les cas d’entrée ou de sortie d’un groupe » (BOI-BIC-RICI-10-10-50 § 140).

 

Cette modification clôture ainsi une insécurité juridique liée à une différence d’interprétation et de fondement et permet alors une pleine application de l’article 4 de l’annexe 1 au règlement n°651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 définissant la PME communautaire.

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