Actu Fiscale
– Février 2025 –
PLF 2025 DÉFINITIVEMENT ADOPTÉ : décryptage par Charlotte Boutillot, avocate associée chez Onelaw !

Contexte
L’adoption du Projet de Loi de Finances (PLF) 2025 a été marqué par un parcours législatif inédit, rythmé par des tensions politiques et des rebondissements majeurs.
La dissolution de l’Assemblée nationale et la démission du gouvernement Attal ont considérablement retardé l’examen du budget 2025. Nous vous rappelons ci-après les grandes étapes :
10 octobre 2024
Présentation du PLF 2025 élaboré par le gouvernement Barnier en Conseil des ministres.
21 octobre 2024
Début des débats à l’Assemblée nationale dans un climat fortement polarisé, avec un nombre record d’amendements, notamment sur la fiscalité écologique et les impôts de production.
Rejet de la première partie du texte, entraînant, conformément à l’article 119 du règlement de l’Assemblée nationale, le rejet global du projet de loi.
21 novembre 2024
Examen du texte par le Sénat, qui introduit des ajustements à tendance plus conservatrice.
5 Décembre 2024
Censure du gouvernement Barnier en lien avec l’adoption du PLFSS, interrompant l’examen du PLF et empêchant son adoption.
Face à cette situation de blocage, une loi de finances spéciale a été promulguée fin décembre afin d’assurer la continuité des services publics jusqu’à l’adoption du budget définitif.
Dès sa nomination, François Bayrou a pris la décision de se baser sur le texte initial du PLF 2025, en intégrant les discussions menées entre octobre et décembre, afin d’accélérer son adoption plutôt que de présenter un nouveau texte.
23 janvier 2025 : Le texte est adopté par le Sénat.
31 janvier 2025 : Une commission mixte paritaire trouve ensuite un accord, ouvrant la voie à un vote à l’Assemblée nationale.
3 février 2025 : Le texte validé par la CMP devait être débattu à l’Assemblée.
Coup de théâtre :
le Premier ministre déclenche l’article 49.3, imposant l’adoption du budget sans vote.
À la suite de cet engagement de responsabilité, une motion de censure a été déposée. Celle-ci a toutefois été rejetée le mercredi 5 février 2025.
Le rejet de la motion de censure entraine l’adoption définitive du texte puisque l’article 49.3 de la Constitution a été utilisé à la dernière étape du vote du projet de loi de finances.
Le texte sera donc promulgué le jeudi 6 février 2025.

Résumé des principales mesures fiscales du PLF 2025
1. Mesures fiscales pour les entreprises
Taxation des grandes entreprises
- La contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises (CEBGE) cible 400 entreprises générant un chiffre d’affaires minimum de 1 milliard d’euros. L’assiette de cette contribution exceptionnelle est basée sur l’impôt sur les sociétés dû par ces entreprises, calculé sur l’ensemble de leurs résultats imposables, en appliquant les taux d’imposition prévus à l’article 219 du Code Général des Impôts (CGI). Le calcul est effectué avant l’application des réductions d’impôt, crédits d’impôt, ou autres créances fiscales pouvant affecter l’impôt à payer. Cette contribution sera finalement appliquée sur un seul exercice fiscal, au lieu de deux comme prévu initialement.
- La taxe exceptionnelle sur les entreprises de fret maritime, visant principalement CMA-CGM, est assortie d’un mécanisme anti-évitement et est désormais limitée à une seule année, au lieu de deux comme initialement prévu.
A noter :
Afin de prévenir les stratégies d’optimisation fiscale liées à la taxe exceptionnelle sur les entreprises de fret maritime et à la contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises (CEBGE), la Commission Mixte Paritaire a décidé de lisser l’assiette en prenant en compte la moyenne de l’impôt sur les sociétés et des résultats d’exploitation sur les exercices fiscaux 2024 et 2025. Un mécanisme d’acompte de 98% a également été instauré, permettant à l’État d’encaisser rapidement les 8,5 milliards d’euros attendus de ces contributions.
- Augmentation de la taxe sur les transactions financières (TTF) : le taux passe de 0,3% à 0,4%.
- Nouvelle taxe sur les rachats d’actions suivis d’annulation, visant les grandes entreprises (chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros) afin de limiter l’optimisation financière.
- Demande d’un dividende exceptionnel à EDF, détenu à 100% par l’État, à partir de 2026.
Incitations et fiscalité des entreprises
- Prolongation du crédit d’impôt innovation (CII) pour trois ans, avec un retour au taux normal de 20% contre 30% actuellement.
- Prolongation du Crédit d’Impôt Collection jusqu’en 2027, sans modification.
- Mesures relatives au crédit d’impôt recherche (CIR) :
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- Suppression du statut de « jeune docteur »
- Fin de la prise en compte des dépenses relatives aux brevets et certificats d’obtention végétale (COV)
- Suppression des dotations aux amortissements des brevets et COV
- Exclusion des dépenses de veille technologique du CIR
- Modification de la définition des subventions publiques : désormais, les subventions sont définies comme « des aides versées par des personnes morales de droit public ou privées chargées d’une mission de service public« . Cette nouvelle définition remplace celle donnée par le Conseil d’État dans sa décision FCBA du 12 juillet 2023
- Réduction des frais de fonctionnement liés aux dépenses de personnel : le taux applicable aux dépenses de personnel passera de 43% à 40%.
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- Report de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) à 2030, initialement prévue pour 2027 :
La loi de finances pour 2023 avait acté la suppression progressive de la CVAE sur deux ans. Ainsi, les taux de la CVAE due par les redevables au titre de l’année 2023 avaient été réduits de 50 % dans la perspective d’une suppression totale en 2024. Cependant, la loi de finances pour 2024 avait déjà reporté la suppression à 2027, en étalant cette baisse sur quatre exercices.
Avec la loi de finances 2025, le calendrier est à nouveau ajusté : la baisse du taux de la CVAE est désormais lissée jusqu’en 2030, avec une suppression complète de la taxe à cette date.
Les taux de la CVAE resteront au niveau de 2024 (taux théorique de 0,28 %) pour les années 2025 à 2027. Ensuite, ces taux baisseront progressivement à 0,19 % en 2028, à 0,09 % en 2029, et seront entièrement supprimés en 2030.
- Suppression de la réduction d’impôt pour les adhérents de centres de gestion et associations agréés (OGA).
- Incitation prolongée pour les employeurs à prendre en charge 75% des abonnements de transport public des salariés jusqu’à fin 2025.
Modification du seuil de franchise en base de TVA
La franchise en base de TVA est un régime fiscal permettant aux petites entreprises d’être exonérées de la déclaration et du paiement de la TVA sur leurs ventes et prestations, à condition que leur chiffre d’affaires ne dépasse pas certains seuils. Actuellement, ces seuils varient selon le type d’activité de l’entreprise.
Cependant, l’article 10 – 5° de la loi de finances pour 2025 introduit plusieurs changements notables :
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Baisse significative des seuils de franchise : Le tableau du second alinéa du I de l’article 293 B du CGI est modifié pour introduire un seuil unique de 25 000 € pour l’année civile précédente et de 27 500 € pour l’année en cours, indépendamment du type d’activité.
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Modification des règles de dépassement : Le II de l’article 293 B sera réécrit pour stipuler que la franchise cesse de s’appliquer dès le dépassement du plafond de chiffre d’affaires de l’année en cours, et ce, pour toutes les opérations intervenant à partir de la date de dépassement.
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Ces mesures simplifient le système de la franchise en base de TVA en instaurant un seuil unique, mais elles réduisent également le nombre d’entreprises pouvant en bénéficier. Plus de 200 000 entreprises pourraient être concernées par ces nouvelles règles, qui les soumettront à la TVA plus rapidement.
Face aux réactions d’inquiétude de nombreux contribuables concernés par cette réforme, le Ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique a publié en urgence un communiqué de presse le 6 février 2025.
Le Gouvernement assure que cette réforme ne remet pas en cause le régime des micro-entrepreneurs, qui concerne 2,4 millions d’entreprises. Toutefois, celui-ci comprend que son adoption sans concertation formelle puisse soulever des interrogations.
En conséquence, la ministre Véronique Louwagie a annoncé l’ouverture d’une consultation avec les parties prenantes dès le 7 février 2025 afin d’adapter la mise en œuvre prévue pour le 1ᵉʳ mars 2025.
Dans l’attente des conclusions de cette concertation, aucune nouvelle obligation déclarative en matière de TVA n’est imposée aux entreprises concernées.
Le Gouvernement communiquera prochainement sur les ajustements éventuels et nous ne manquerons pas de les commenter.
Soutien au monde agricole
- Renforcement de la déduction pour épargne de précaution (DEP) en cas de sinistre climatique ou sanitaire.
- Relèvement du taux d’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) en faveur des terres agricoles.
- Reconduction du crédit d’impôt remplacement jusqu’à fin 2027.

2. Mesures fiscales pour les particuliers
Impôt sur le revenu et contribution exceptionnelle
- Indexation du barème de l’impôt sur l’inflation. Cette mesure vise à éviter une hausse mécanique de 3,7 Mds € d’impôts supplémentaires. Le barème de l’impôt sur le revenu 2025 est ainsi revalorisé de 1,8 % par rapport au barème 2024 :
– 0 % : jusqu’à 11 497 €
– 11 % : entre 11 498 € et 29 315 €
– 30 % : entre 29 316 € et 83 823 €
– 41 % : entre 83 824 € et 180 294 €
– 45 % : au-delà de 180 295 €
- Création d’une contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR) pour les très hauts revenus.
Cette contribution concerne : les célibataires, veufs, séparés ou divorcés, gagnant plus de 250.000 € par an et les couples gagnant plus de 500.000 € par an. Le texte prévoit un mécanisme de décote lorsque les revenus sont inférieurs à 330. 000 euros pour une personne seule (ou 660 000 euros pour un couple). Celle-ci impose un taux minimal de 20 % sur l’impôt dû par ces contribuables.La mesure touche principalement les revenus du capital (dividendes, plus-value, etc.) qui bénéficient actuellement d’une flat tax de 30 % (qui se décompose en 12,8% d’impôts sur le revenu et 17,2% de prélèvements sociaux). La CDHR fait ainsi augmenter le taux d’imposition à 20% pour ces contribuables, ce qui portera la flat tax à 37,2%. Elle devrait concerner moins de 25.000 foyers.
Initialement prévue pour une durée de trois ans, elle ne sera finalement appliquée que pendant un an.Le rendement de ce dispositif est annoncé autour de 2 milliards d’euros.
Fiscalité écologique et transports
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- Renforcement du malus CO₂ et du malus au poids sur les véhicules polluants.
- Hausse de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA) avec un passage à 7,40 € (contre 2,63 €) en classe économique pour les vols européens (application dès mars 2025).
Logement et immobilier
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- Rétablissement du prêt à taux zéro (PTZ) sur tout le territoire jusqu’en décembre 2027.
- Exonération temporaire des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) pour les dons familiaux jusqu’à fin 2026.
- Augmentation du plafond des frais de notaires (les droits de mutation à titre onéreux ou DMTO), perçus par les départements. Ce plafond est relevé de 0,5 point pour l’achat d’un bien immobilier (passant de 4,5 % à 5 %), sauf pour les primo-accédants à la propriété.
- Reconduction du dispositif Loc’Avantages (ex-Louer Abordable) jusqu’en 2027.
- Réforme de la fiscalité des locations meublées (LMNP) : suppression de la niche fiscale permettant la non-intégration des amortissements dans le calcul de la plus-value à la revente (sauf exceptions).
- Taxe d’habitation recentrée sur les résidences secondaires. Cette évolution permettra notamment de ne plus assujettir à la taxe certains locaux comme les structures d’hébergement d’urgence pour les personnes en difficulté.
Autres mesures fiscales pour les particuliers
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- Le taux de TVA sur la fourniture et la pose des chaudières à gaz est désormais augmenté à 20%.
- Exonération fiscale et sociale des pourboires reconduite en 2025.
- Prolongation de la monétisation des jours de RTT jusqu’à fin 2026.
- Pérennisation des réductions d’impôt sur les dons :
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- 75% de réduction pour les dons faits aux organismes d’aide aux personnes en difficulté (dispositif « Coluche »).
- Réduction d’impôt pour les dons aux organismes luttant contre les violences conjugales.
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3. Réduction des dépenses publiques
- L’enseignement scolaire reste le premier poste budgétaire, la suppression annoncée de 4 000 postes d’enseignants est abandonnée.
- Les budgets de la Défense, de l’Intérieur et de la Justice sont préservés.
- Revalorisation du budget des Outre-mer, notamment pour Mayotte.
- Diminution des budgets de plusieurs ministères : Travail (baisse des aides à l’apprentissage), Écologie, Aide publique au développement.
- Réduction des crédits du Service national universel.
- Baisse de l’indemnisation des arrêts maladie des fonctionnaires : 90% (contre 100% actuellement), mais rejet de l’extension du délai de carence de 1 à 3 jours.
- baisse des crédits dédiés à l’Aide Médicale d’État de 111 millions d’euros sur 1,3 milliard. Ce chiffre permettra de maintenir les crédits alloués à cette aide réservée aux soins des étrangers en situation irrégulière à leur niveau de 2024.

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